JONCALES

JONCALES
JONCALES

Les Joncales constituent un ordre de plantes monocotylédones comptant moins de quatre cents espèces herbacées qui habitent surtout les régions tempérées ou froides des deux hémisphères; la plupart des Joncales constituent la famille des Joncacées, elle-même principalement représentée par les joncs (genre Juncus ), qui sont par excellence des colonisateurs des milieux marécageux, où ils forment, mêlés ou non aux Cypéracées et aux Graminées, des peuplements souvent denses.

Le jonc articulé

De taille et d’aspect assez variables, le jonc articulé est une herbe vivace. Ses tiges, souvent en touffes, bien que produites par un rhizome grêle, sont faibles, généralement plus ou moins étalées ou même couchées, et ne dépassent pas 80 cm. La tige cylindrique porte quelques feuilles alternes, comprimées latéralement, arquées, creuses à l’intérieur entre des épaississements sclérenchymateux simulant des cloisons transversales (d’où le nom de jonc articulé).

L’inflorescence est une panicule dont les rameaux ultimes portent des glomérules compacts de quatre à huit fleurs brunes longues de 3 à 4 mm. Ces fleurs sont régulières, à périanthe en deux cycles différant très peu l’un de l’autre (fig. 1), de trois pièces chacun; ces pièces sont coriaces, brunes, aiguës. L’androcée compte six étamines semblables, le gynécée est un ovaire cylindro-conique syncarpique surmonté de trois stigmates; à maturité, la capsule loculicide à trois valves libère de nombreuses petites graines, insérées sur les placentas pariétaux; l’embryon, inclus dans l’albumen farineux, est petit et droit.

Juncus articulatus habite les prairies marécageuses, surtout sur sols acides; supportant, grâce à son port diffus ou prostré, le pâturage ou la fauche, il est très commun dans de tels milieux en Europe et en Asie tempérées, régions froides exclues, et se rencontre jusque dans l’est de l’Amérique du Nord; il est également connu, à l’état d’introduction, en Afrique du Sud, en Australie et en Nouvelle-Zélande.

La famille des Joncacées

Toutes les Joncacées sont des herbes, même le si curieux Prionium sud-africain qui forme d’impénétrables fourrés dans le lit des cours d’eau. Souvent la souche est vivace, soit cespiteuse, soit rampant horizontalement; mais la famille compte aussi des annuelles. Quelques Joncacées sont adventices, tel Juncus tenuis , espèce américaine qui, en un temps record, a envahi les allées des forêts européennes.

Les feuilles sont alternes, généralement rassemblées vers la base de la tige, linéaires, planes, canaliculées ou plus ou moins cylindriques, souvent fistuleuses et pourvues d’épaississements imitant des cloisons (fig. 2); parfois encore, la feuille est réduite à sa gaine, la fonction chlorophyllienne étant totalement assumée par les tiges vertes, c’est le cas de J. effusus , J. inflexus , etc., espèces qui infestent les pâturages pauvres et humides et en réduisent considérablement la valeur fourragère.

L’inflorescence est très variable, depuis la fleur solitaire jusqu’à la panicule diffuse, en passant par les types les plus variés de corymbes, grappes d’épis, glomérules, etc., l’inflorescence élémentaire appartenant au type fondamental cymeux. La fleur offre au contraire une structure assez constante, très voisine de celle des Liliales; elle est régulière, trimère, aux cycles périanthaires peu différenciés, demeurant herbacés, scarieux ou coriaces; l’androcée compte typiquement deux cycles, plus rarement un seul; le gynécée enfin se compose de trois carpelles soudés en un ovaire soit uniloculaire à placentation pariétale, soit plus ou moins complètement triloculaire, la placentation devenant alors axile. Les ovules anatropes sont soit nombreux en deux rangs sur chaque placenta, soit un seul par placenta (Luzula ). Le fruit est une capsule à déhiscence loculicide, contenant des graines souvent nombreuses et petites, fréquemment pourvues d’un appendice amylacé.

La petitesse des fleurs interdit la zoogamie, sauf dans certaines luzules aux fleurs blanches relativement grandes; le cas général est l’anémogamie. La dissémination des graines, eu égard à leur petitesse et à l’habitat palustre de beaucoup d’espèces, est le plus souvent effectuée par le vent, l’eau ou les oiseaux aquatiques.

Les Joncacées comptent huit genres; les principaux sont Juncus (225 espèces), aux capsules à nombreuses graines, répandu dans les zones marécageuses tempérées des deux hémisphères, et Luzula (80 espèces), dont les capsules n’ont que trois graines, qui préfère des sites plus drainés, prairies ou sous-bois, et qui habite surtout l’hémisphère Nord. Les autres genres sont tous confinés dans l’hémisphère Sud; ils comptent un très petit nombre d’espèces, mais n’en offrent pas moins un grand intérêt pour la compréhension de l’évolution de la famille: Prionium , le palmite sud-africain, est un pseudo-arbuste aux feuilles coupantes imitant quelque peu les Pandanus ; à la flore antarctique appartiennent les Marsippospermum , qui présentent des fleurs solitaires sur de longues tiges et les Distichia , dont les fleurs dioïques terminent des tiges densément couvertes de feuilles distiques, imbriquées et agglomérées en coussins compacts.

La diversification des genres dans l’hémisphère Sud fait aujourd’hui prévaloir une origine australe à l’ensemble de la famille, quoique d’autres centres d’origine aient pu parfois être proposés.

L’ordre des Joncales

Le développement de la fleur en appareil attractif mis à part, la similitude entre Joncacées et Liliacées est frappante quant à l’organisation florale. Aussi tous les auteurs s’accordent-ils à reconnaître l’étroite affinité entre ces deux familles; autour d’elles gravitent cependant plusieurs autres, reliées par certains traits aux Commélinales; de ce fait, la délimitation de l’ordre des Joncales reste un sujet de désaccord; certains auteurs nient même son existence, rattachant les Joncacées aux Liliales, les autres familles aux Farineuses (Commélinales). Le regroupement par affinité des diverses familles de Monocotylédones soulève depuis longtemps de telles controverses, qui ne sauraient étonner en raison de l’étroitesse et de la multiplicité des liaisons possibles entre elles; ainsi, parmi les Joncales, Joncacées mises à part, aucun auteur n’a placé les mêmes familles satellites: L. Emberger admet Flagellariacées, Rapatéacées et Thurniacées, toutes familles exclusivement tropicales, de faible importance numérique; mais pour J. Hutchinson, les Flagellariacées et les Rapatéacées, dont la corolle est différenciée, ne sauraient entrer dans les Joncales, qui comprennent inversement Centrolépidacées et Restionacées, dont les fleurs montrent le même degré de petitesse et de réduction que les Joncacées.

Cette situation illustre bien les difficultés d’interprétation évolutive qu’offrent les structures, surtout inflorescentielles, des Monocotylédones, et la façon dont l’attribution d’une valeur préférentielle à un caractère donné peut aboutir à des conclusions phylogéniques bien différentes.

Les Thurniacées sont une très petite famille (1 genre, 2 espèces) des forêts amazoniennes, aux fleurs rassemblées en têtes compactes. Les Rapatéacées (8 genres, 25 espèces), également amazoniennes, à l’exception d’un unique genre ouest-africain, montrent elles aussi des pseudo-capitules involucrés de larges bractées foliacées; mais elles ont une corolle différenciée, aux pétales généralement soudés en tube. Ces deux familles de Joncales offrent une ressemblance générale frappante avec certaines Cypéracées (Mapania ) habitant les mêmes milieux sombres et humides.

Les Flagellariacées sont de grandes herbes parfois grimpantes grâce à des feuilles terminées en vrille, habitant les tropiques de l’Ancien Monde (3 genres, 10 espèces); leur fruit est une drupe.

Les attaches des Joncales avec les Liliales semblent certaines; mais il reste à savoir dans quel sens a progressé l’évolution; pour beaucoup d’auteurs, les Liliales ont engendré les Joncales par réduction des fleurs et adaptation à l’anémogamie, tendances qui, poursuivies, auraient ensuite donné naissance aux Cypérales, après perte de la symétrie radiaire du plan floral. Mais la thèse inverse peut être aussi soutenue, qui ferait dériver les corolles brillantes des Liliales des petites fleurs herbacées des Cypérales et des Joncales. La connaissance plus complète que l’on peut acquérir des Cypérales tropicales semble susceptible d’éclairer différemment cette question. Quant au problème de l’inclusion ou non des familles qui gravitent entre Joncales et Commélinales, il est sans doute prématuré de vouloir le trancher définitivement, la compréhension taxonomique de ces familles devant s’étayer sur des observations multiples.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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